Domme - Une Bastide Perchée
LA CLEF DE VOÛTE. Perchée sur les hauteurs d'une falaise vertigineuse et surplombant les méandres de la Dordogne, la nature a fait du mont de Domme le site idéal pour une place forte. Domme est une bastide (ville neuve fondée sur décision royale) élevée en 1281 par le roi de France Philippe II le Hardi contre la menace anglaise. Dès sa création, Domme se voit accorder des privilèges comme celui de battre sa propre monnaie, d'avoir des consuls, administrateurs et juges, ainsi que des exemptions.
La Bastide de Domme a du se conformer aux exigences du site. De ce fait, elle ne possède pas le plan régulier des autres bastides de la région : au lieu d'être carrée ou rectangulaire, elle est en forme de trapèze, et les rues suivent autant que possible un plan géométrique. Les fortifications son adaptées à la configuration naturelle du site en prenant appui sur les assises rocheuses affleurant ça et là. Son édification, commencée en 1283, pose de nombreux problèmes techniques. Ce n'est qu'en 1310 que la construction de l'enceinte est achevée.
Le site de Domme constituait un emplacement hautement stratégique qui semblait idéal pour contrecarrer les velléités d'expansion anglo-gasconnes. Et pourtant, sa position privilégiée n'empêcha pas la bastide d'être prise et reprise plusieurs fois. Dès 1346, les Anglais s'emparent de la ville et celle-ci devient tour à tour bastide anglaise ou française. Ce n'est qu'en 1438 que la bastide redevient définitivement française.
L'ensemble fortifié de la ville est en parti démantelé à la fin des guerres de Religion mais les remparts restent aujourd'hui assez complet dans les parties sud et est. Ils sont percées de trois portes : la Porte des Tours, l'une des plus belles du Périgord (cette porte est flanquée de deux grosses tours à bossage du XIIIe siècle qui abritaient la garnison et pouvaient servir de prison comme en témoignent les énigmatiques graffitis laissés par des prisonniers Templiers enfermés ici entre 1307 et 1318), la Porte de la Combe, et la Porte del Bos qui signifie du bois en français (elle était située à proximité d'un bois où furent pendus les traîtres qui livrèrent Domme aux Anglais en 1346).
À l'intérieur de la bastide subsistent de belles maisons anciennes de style roman et Renaissance. Près de la place de la Rode, la maison du batteur de monnaie témoigne des privilèges commerciaux octroyés à ces nouvelles villes. Construite en 1282, cette maison est l'endroit où l'on battait les pièces de cuir noir pour payer les bâtisseurs de la cité. Situé dans la ville basse, la place de Rode est l'une des deux places de la bastide. Elle est non seulement le lieu des supplices (place de «la Roue») mais aussi celle des foires qui s'y tenaient, quatre fois l'an, sur décision royale.
Sur la place de la Halle, située sur la partie haute de la ville, là où vivaient les notables, l'Hôtel du Gouverneur, construite au XVe siècle, a été surélevée d'une haute tour carrée au XVIe. La veille Halle occupe le centre de la place depuis le XVIIe. Elle devait servir de marché couvert au rez-de-chaussée et, à l'étage, de maison commune où se réunissait les autorités. Une rangée de colonnes en pierres sculptées supporte le balcon et une galerie en charpente. Aujourd'hui elle abrite l'entrée des grottes.
Comme pour la plus part des bastides, l'église n'est pas implanté au bord de la place centrale mais légèrement à l'écart. Construite avec les pierres de l'ancienne église détruite pendant les guerres de Religions, elle présente une façade constituée d'un clocher-mur. Le fronton de l'église porte la date de sa construction, soit 1622, et le porche d'entrée celle de 1883, année de sa restauration. L'édifice est composé d'une nef unique avec quatre chapelles latérales voûtées en pierre. La nef est couverte d'une voûte en pierre dressée en berceau surbaissé, percée de quatre fenêtres à pénétration. La Sainte Vierge fut de tout temps très honoré à Domme. Aussi l'église paroissiale a-t-elle pour patronne et titulaire Notre-Dame de l'Assomption.
En passant devant l'église on accède ensuite au belvédère de la Barre, qui s'élève à 212 mètres au-dessus du niveau de la mer et à 150 mètres au-dessus de la rivière. De là, le panorama embrasse un cirque de plus de 40 kilomètres sur la vallée de la Dordogne, avec des champs bien travaillés et des châteaux bien cachés. Depuis ce sommet, on a du mal à imaginer qu'une grande cavité se trouve juste au-dessous. C'est qu'une grande grotte naturelle s'étend entièrement sous la bastide de Domme.
Domme connaîtra la prospérité jusqu'au XVIIe siècle puis périclitera. Hors des grandes voies de communication, sans industries, la cité s'assoupira, victime de l'exode rural. Domme a traversé les siècles sans presque subir les ravages du temps et s'offre à nous telle qu'elle était au Moyen Âge.